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dimanche 1 janvier 2012

L'Égypte est une cleptocratie militaire

Voici de larges extraits d'un article paru dans Egypte Solidarité que je vous invite à lire in extenso :



Les produits alimentaires et " militaires " Safi

Jusqu’à aujourd’hui, le rôle de l’armée dans l’économie égyptienne reste un des tabous majeurs dans le pays. Durant les trente dernières années, l’armée s’est appliquée à dissimuler toutes informations concernant ses énormes intérêts dans l’économie nationale. Les Forces armées égyptiennes possèdent un pan entier de l’économie. De 25 à 45 %, selon certaines estimations. Des généraux de l’armée et des colonels gèrent des compagnies, malgré leur manque d’expérience, de formation et de qualifications nécessaires.

Les intérêts économiques de l’armée englobent une panoplie d’activités diversifiées et rentables, allant de la vente et l’achat dans l’immobilier pour le compte du gouvernement, aux services de nettoyage, des cafétérias à la gestion de stations-service, de l’élevage de bétail aux produits alimentaires, en passant par la fabrication de sets de table en plastique… Toute information concernant ces activités est déjà disponible sur les sites Web de ces sociétés et de ces usines, qui, publiquement, divulguent fièrement qu’elles appartiennent à l’armée. Pourtant, l’institution militaire insiste pour déclarer illégale toute mention publique de ces activités.

Toute tentative d’énoncer ce type d’activités en public aboutirait à des poursuites militaires et à des procès. Car cela est considéré comme des informations "secrets sécurité nationale" que tout rival ou ennemi de l’Égypte, comme Israël [je croyais qu'un traité de paix avait été conclu entre l’Égypte et Israël il y a quelques décennies....], ne doit pas connaitre !

Quand les programmes de privatisation entre 2004 et 2011 se sont accélérés sous la férule de Gamal Moubarak et son cabinet d’hommes d’affaires, les sociétés relevant des militaires n’ont pas été touchées. En fait, les officiers de haut rang de l’armée ont reçu leur part des bénéfices d’une privatisation marquée par la corruption, notamment sous la forme de nominations à des postes prestigieux dans les entreprises du secteur public récemment privatisées.

En réalité, l’armée réussit à vendre ses produits, non en raison de leur qualité supérieure, mais plutôt par des pratiques draconiennes. Par exemple, l’armée force des soldats listés à dépenser leurs maigres salaires pour des produits alimentaires de l’armée, dans les cantines militaires de régions éloignées où les autres produits ne sont pas disponibles. Dans d’autres cas, l’armée fait distribuer ses produits par des revendeurs civils en échange de "faveurs" et de dessous de table.

De plus, l’armée est lourdement impliquée dans des expropriations de terrains suite à une loi qui permet de saisir n’importe quelle parcelle de terre publique sous le prétexte de "défense de la nation". En pratique, les militaires utilisent cette loi pour s’approprier des parcelles publiques pour des investissements commerciaux. Une agence connue comme "les Projets immobiliers des Forces armées" s’est spécialisée, comme son nom le suggère, dans le lancement de projets sur des terrains contrôlés par les Forces armées. Les propriétés appartenant à cette agence incluent des terrains situés dans la Cité Nasr dans laquelle des complexes résidentiels sont actuellement en construction. Sur la côte nord, l’armée utilise ces terrains saisis pour construire des stations de vacances touristiques et des hôtels, comme à Sidi Krir...

L’"Usine Militaire 99" est devenue célèbre pour la répression de ses ouvriers, les employés n’ont pas de syndicat et ne sont pas soumis aux lois gouvernementales régissant le code du travail. En août 2010, les ouvriers ont lancé un mouvement de protestation après la mort d’un de leurs collègues suite à une explosion. Le directeur de l’usine, lui aussi un général, avait introduit un certain nombre de bouteilles de gaz de butane pour les tester, bien que les ouvriers n’aient pas été formés à cela. Quand plusieurs bouteilles ont éclaté, il a déclaré aux ouvriers qu’il importait peu si un ou deux d’entre eux mourraient. Pour avoir ensuite envahi son bureau, l’avoir battu et organisé un sit-in, les leaders ouvriers ont été jugés par des cours militaires, accusés de trahison pour avoir révélé "des secrets militaires", en l’occurrence pour avoir parlé publiquement de ces bouteilles de gaz !

Ceci nous amène à la question du traitement répressif des ouvriers dans les exploitations agricoles gérant le bétail appartenant aux militaires. Ces ouvriers sont d’habitude de pauvres conscrits qui travaillent sans être payés. L’histoire typique se déroule comme suit. Les soldats issus de zones rurales ou de villes pauvres sont enrôlés en principe pour répondre à leur devoir de citoyen mais finissent très vite par se retrouver à travailler de force dans une de ces fermes à bétail de l’armée, qui s’étendent généralement sur des centaines de milliers d’acres. Ce sont des situations très humiliantes pour ces enrôlés à qui l’on demande de garder des bovins, ramasser des œufs ou gérer des batteries de poulets. Là, ils perdent tout sentiment de dignité nationale, que l’armée devrait normalement leur inculquer. En cas de conflit armé, il ne faudra rien espérer de ces militaires exploités, humiliés et peu formés au combat.

Magasin militaire égyptien
Égypte solidarité a repris et adapté un article
par Mohamed Al-Khalsan, Article original en arabe et en anglais Source : http://www.jadaliyya.com

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